Affaire d'adultère d'Essaouira : La Cour suprême innocente la jeune fille

Dans une affaire d’adultère concernant une jeune fille mineure à Essaouira, la Cour suprême a rendu son arrêt qui innocente la fille en invoquant son jeune âge et son manque de discernement au moment des faits. Une décision qui rejette définitivement un pourvoi en cassation du Parquet.

C’est un précédent dans les annales de la justice familiale dans notre pays. Dans un arrêt inédit rendu récemment, et qui aurait pu passer inaperçu, la Cour suprême décide d’innocenter une jeune fille mineure (16 ans) accusée d’adultère dans une affaire judiciaire qui s’est déroulée à Essaouira. La Cour suprême estime que la jeune fille est protégée par la loi en raison de son manque de discernement et devrait donc être traitée comme une victime d’attentat à la pudeur.

L’arrêt de la Cour suprême est en quelque sorte un rejet définitif du pourvoi en cassation introduit par le Parquet d’Essaouira, qui continue d’incriminer la jeune fille. Les faits remontent en effet à l’été 2019 lorsqu’une fille mariée a été arrêtée en flagrant délit d’adultère suite à une plainte déposée par son mari.

La jeune fille a par la suite fait l’objet d’un procès en Première instance qui a prononcé son innocence en s’appuyant sur l’article 484 du Code pénal, qui protège les mineurs contre les tentatives d’attentat à la pudeur en raison, notamment, de leur jeune âge et leur manque de discernement. Le même verdict d’innocence a été prononcé par la Cour d’appel avec les mêmes arguments que ceux avancés par le tribunal de première instance.

Un jugement en appel qui n’a pas convaincu le Parquet, qui invoque pour sa part une infraction à l’article 491 du Code pénal, qui punit d’un an à deux ans d’emprisonnement toute personne mariée convaincue d’adultère. L’article 22 du Code de la famille a été également employé par le Parquet comme argument pour rendre coupable la jeune fille.

Mais la Cour suprême s’aligne sur les décisions des juges du tribunal de Première instance et de la cour d’Appel. Cette bataille judiciaire entre les juges et le Parquet reflète clairement de forts clivages dans la société entre ceux qui condamnent l’adultère quel que soit l’âge de la jeune mariée et ceux qui plaident pour la tolérance en invoquant des considérations de conscience.

Une logique contradictoire
Malgré son importance, l’arrêt de la Cour suprême n’a pas été beaucoup commenté par les experts sauf par quelques-uns d’entre eux, notamment l’ancien salafiste, Abdelouahab Rafiqui, alias Abou Hafs, qui salue cette décision qui, selon lui, constitue une première dans l’histoire judiciaire nationale. Mais, pour de nombreux oulémas et juristes, il s’agit d’une décision qui enfreint le Code de la famille, qui stipule que les liens de mariage sont sacrés et de ce fait tout acte d’adultère établi devrait être puni par la loi. D’autres estiment qu’il faut traiter tout le problème des mariages des mineurs et en finir avec ces actes interdits mais tolérés.

La société ne peut pas fonctionner selon une logique contradictoire: tolérer les mariages des mineurs d’un côté et de l’autre permettre aux jeunes filles mariées d’avoir des relations sexuelles extraconjugales. Une situation forcément conflictuelle et très complexe qui expose la société à des risques de dérive identitaire en rapport avec les enfants qui pourraient naître de ces relations extraconjugales.

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