Éviter le pire du multilatéral
En déclarant récemment que le Maroc ne profite pas, du moins à court terme, de l’accord de libre-échange signé, il y a dix ans, avec les États-Unis d’Amérique, Mohammed Boussaid, le ministre de l’économie et des finances, semble se ranger parmi ceux qui estiment que le libre-échange n’est pas la panacée pour résoudre tous les problèmes liés à l’intégration de certains pays en développement au système commercial mondial.
Sur la question de savoir comment en tirer le meilleur et éviter le pire du système multilatéral des échanges, les réponses ont de tout temps été controversées. Tout dépend du contexte historique.
Aujourd’hui, le monde traverse le pire ralentissement économique depuis la Grande Dépression (1929-1939). Cette dernière reste bien présente dans la mémoire de ceux qui veulent empêcher le retour des politiques nationales «d’égoïsme sacré» menées dans les années 1930. Affirmant, notamment, qu’en «exportant» le chômage causé par la dépression économique, les politiques protectionnistes et les dévaluations compétitives auraient contribué à propager la crise dans le monde entier et, finalement, favorisé l’arrivée des pouvoirs totalitaires.
C’était pour éviter cette situation, qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, certains gouvernements alliés, et à leur tête les États-Unis et le Royaume-Uni, jetèrent les bases de ce qu’on appelle le nouvel ordre monétaire et financier international, complété par un nouvel ordre commercial basé dès 1948 sur les règles du GATT (Accord général sur les tarifs et le commerce).
Il faudra attendre le traité de Marrakech de 1994 pour que soit créée, l’année suivante, une nouvelle organisation internationale, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dans laquelle s’intègre l’ancien GATT.
Depuis cette époque et surtout au cours des trois dernières décennies l’économie de la planète a connu de multiples transformations et restructurations. Elle est de plus en plus façonnée par la mondialisation. Son visage est aujourd’hui bien différent de ce qui était dominant jadis.
En effet, depuis surtout la fin des années 1980, non seulement le volume de la production a plus que doublé, mais les échanges de marchandises et les investissements directs à l’étranger (IDE) ont progressé respectivement, deux fois et quatre fois plus vite que le PIB en valeur, témoignant d’une montée en flèche de l’ouverture –et donc aussi de l’interdépendance- des économies.
Certes, cette ouverture a profité plus à certains pays d’Asie, qui étaient à peu près au même niveau de développement que beaucoup de pays d’Afrique comme le Maroc dans les années 1960, confirmant le rôle joué, notamment, par les exportations. L’expérience de ces pays montre aussi que pour qu’une nation saisisse les opportunités du système du commerce mondial, elle doit non seulement engager les réformes prioritaires nécessaires en matière de développement politique, économique et social; mais valoriser aussi les produits et les services exportables pour profiter d’une meilleure intégration des chaînes de valeur dans l’économie mondiale.
Chaînes de valeur plus que jamais traversées de bout en bout par les tratégies conquérante des firmes globales