VIVA ESPAÑA

MUSTAPHA SEHIMI

VISITE DU ROI D’ESPAGNE AU MAROC


L’Espagne et son gouvernement sont attachés à inscrire leurs relations avec le Maroc dans la continuité.

Invité par SM Mohammed VI, le Roi Felipe d’Espagne effectuera, les 13 et 14 février 2019, une visite officielle au Maroc. Celle-ci est placée sous le signe de l’amitié, plus encore des symboles dont les relations entre les deux pays sont marquées. Bien sûr, la proximité géographique est là: entre l’Espagne et le Maroc, il n’y a qu’un détroit, une quinzaine de kilomètres. Une situation qui génère bien des servitudes et qui n’est pas forcément un gage de bon voisinage et encore moins d’une coopération féconde. En se tournant, au passage, vers notre voisin de l’Est, la preuve contraire est faite que la géographie, seule, n’impose pas mécaniquement, pourrait-on dire, une zone de paix, d’entente et de coopération.

Alors? Alors, entre le Maroc et l’Espagne, ce ne fut pas, dans une longue séquence historique, un long fleuve tranquille. Mais ce qu’il faut relever, c’est qu’en dernière instance un crédo partagé a fini par l’emporter.

Les vicissitudes de toutes sortes n’ont pas manqué en effet, avec le protectorat espagnol, puis la décolonisation et le recouvrement quasiment achevé de l’intégrité territoriale du Royaume en 1975, avec la Marche Verte –reste le statut des présides de Sebta et Mellila encore en instance… une évolution en dents de scie paraît bien être le marqueur des relations bilatérales; à des périodes d’accalmie –de bonne entente mêmesuccèdent de manière récurrente des moments de crispation, voire de tension. Mais, au final, l’appréhension des intérêts supérieurs de chacun des deux pays finit par l’emporter. Pareille approche porte ses fruits et de multiples facteurs poussent dans ce sens. D’abord, celui-ci: les liens étroits entres les maisons royales. Ce capital–là, on le doit aux relations personnelles entre les monarques, hier Hassan II et Juan Carlos et aujourd’hui entre Mohammed VI et Felipe VI. Même si leur statut institutionnel respectif n’a pas la même nature ni les mêmes responsabilités, il reste que cette intimité aide toujours à fluidifier les rapports interétatiques et à les recadrer peu ou prou vers leur cours naturel. Il y a là du volontarisme qui est d’ailleurs porté et consolidé par le matelas d’intérêts communs ainsi que par une large convergence sur les exigences d’une zone de paix, de stabilité et de prospérité.

Les défis sont connus. Celui d’intérêts économiques à promouvoir. Que l’Espagne ait surclassé la France pour devenir depuis 2016 le premier partenaire du Maroc traduit bien des échanges commerciaux dans cette vision d’avenir. Que la concertation soit davantage établie et accompagnée dans des domaines comme la lutte antiterroriste est une nouvelle illustration du rapprochement entre Rabat et Madrid. Que la diplomatie espagnole réitère sa position de soutien aux thèses marocaines à propos des provinces méridionales récupérées complète le tableau. L’on a eu d’ailleurs une autre expression de cette attitude avec l’appui de Madrid pour ce qui est des deux accords agricole et de pêche signés entre le Maroc et l’Union européenne.

L’Espagne et son gouvernement –de droite ou socialiste– sont attachés à inscrire leurs relations avec le Maroc dans la continuité jusqu’à les hisser au niveau d’un partenariat stratégique d’exception. Un modèle emblématique de coopération Nord–Sud sans doute mais aussi euromaghrébin et même euro-africain. À cet égard, le Maroc de 2019, n’est plus celui des précédentes décennies du siècle dernier. Il a assis un modèle démocratique pluraliste consacré par la Constitution de juillet 2011. Il s’est également redéployé en direction du continent en innovant dans les formules de partenariat. Il veille à mettre sur pied un grand hub régional pouvant être un dispositif clé dans la promotion d’un nouvel espace économique triangulaire Europe –Maroc– Afrique.

Un regard sur l’espace régional, maghrébin ou arabe, permet de jeter une lumière crue sur un Maroc en marche, dans sa voie spécifique, tourné vers l’avenir et tendant la main à l’Espagne pour capitaliser davantage les acquis et explorer les pistes permettant d’aller encore plus loin. Un axe Rabat–Madrid adossé à des valeurs communes. À un projet de société. Et à des ambitions mobilisatrices pour les deux peuples.

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