Jeune enfance... grande misère

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La mollesse de la législation pointée du doigt par nombre d’acteurs associatifs


A l’occasion de la journée internationale de lutte contre l’emploi des enfants, célébrée ce mardi 12 juin, les associations marocaines montent au créneau. La situation reste alarmante. La loi 19-12 luttant contre cette exploitation est là, mais n’est pas appliquée.

La journée internationale de lutte contre l’emploi des enfants, commémorée le 12 juin, se veut pour thème cette année 2018 «Génération sécurité et santé». Une journée où l’organisation internationale du travail a fait état de quelque 152 millions d’enfants travailleurs dans le monde. 74 millions d’entre eux exerceraient un travail de nature à nuire gravement à leur santé. Une journée qui retentit comme une alarme de rappel pour les huit associations marocaines œuvrant de concert contre le mauvais traitement que subit la jeune enfance.

Des associations qui, rappelons-le, ont bénéficié d’un budget d’un million de dirham ces dernières années, depuis 2015, pour mener à bien leur projet de lutte contre l’emploi des enfants dont l’âge est en dessous des 16 ans. A ce propos Omar Saâdoune, responsable du pôle de la lutte contre le travail des petites filles au sein de l’association Insaf nous dit: «Nous remarquons un manque de volonté pratique de la part du gouvernement. Comment se fait-il que le projet de loi 19-12 interdisant le travail des petites filles en dessous des 16 ans, adopté en 2013, ne soit pas appliqué?».

Sara, âgée aujourd’hui de 21 ans, a été confiée à l’âge de 7 ans à une famille à Marrakech. Comme petite bonne, elle a subi les pires calvaires. Des cicatrices lui viennent rappeler sa mauvaise fortune. Le fruit de sa sueur ne lui est jamais revenu mais plutôt à ses parents. Sauvée par l’association Insaf, après deux ans d’exploitation, elle fut réinsérée, appelée à suivre son cursus scolaire aux frais de l’association. Aujourd’hui, elle poursuit ses études à la faculté. L’association avait alloué un montant de 250 DH par mois à la famille de Sara après que cette dernière ait été prise en charge.

Absence d’écoles
Omar Saâdoune rappelle que quelque 156 petites filles bénéficient des aides de l’association. Sara n’est qu’un cas parmi mille. Selon les derniers chiffres en date, le collectif pour l’éradication du travail des petites bonnes fait état de 60.000 petites bonnes. Omar Saâdoune reproche au gouvernement de ne pas mobiliser les moyens nécessaires pour rendre un chiffre plus représentatif de cette population. Aussi insiste-t-il sur le diagnostic qui devrait être mené une fois les chiffres arrêtés. Selon les derniers chiffres du HCP, le travail des enfants a connu une baisse significative de 1999 à 2015. Ainsi serait-on passés de 157.000 à 57.000 en l’espace de 6 ans.

Des enfants qui, malgré la modification de la loi de 1947 autorisant le travail des enfants dès l’âge de 12 ans, restent exploités de nos jours. Une exploitation plus prononcée dans le milieu rural, où les enfants s’affairent à cultiver la terre, travaillant pour le compte de leurs parents sans le moindre sou. La mollesse de la législation est pointée du doigt par nombre d’acteurs associatifs, car l’enfant, après la modification de la loi, ne devrait avoir accès au travail qu’après l’accomplissement de son parcours scolaire obligatoire. Chose qui n’est pas observée, surtout dans le milieu rural.

L’acteur associatif nous dit à ce propos «si l’on ferme l’oeil sur le travail des enfants dans ces douars que je sillonne souvent, c’est que la pauvreté, ainsi que l’absence des écoles font ravage. On ne peut appliquer la loi sans mettre en place les infrastructures nécessaires».

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