Entretient avec Youssef DOUIEB, DG Adjoint de Euler Hermès Maroc

Youssef DOUIEB Youssef DOUIEB

Maroc Hebdo: Quels sont les secteurs les plus touchés par la défaillance des entreprises?
Youssef Douieb :
Le secteur de la construction au sens large est le plus sinistré aujourd’hui  mais la situation est devenue plus complexe depuis quelque temps, dans la mesure où,  d’une part, la défaillance n’est plus l’apanage des PME-PMI évoluant dans ce secteur et  nous assistons, d’autre part, à un phénomène tout à fait inédit, à savoir les difficultés que  traversent aujourd’hui de grands groupes marocains évoluant dans des secteurs divers tels  que l’agroalimentaire ou l’électronique. Nous constatons aussi que ces difficultés résident  beaucoup plus dans des aspects liés à la trésorerie de ces entreprises que dans l’étroitesse de  leurs carnets de commande ou leur rentabilité.

Quelles sont les raisons de défaillance de ces entreprises?
Youssef Douieb :
Dans un 1 cas sur 4, c’est souvent une mauvaise gestion du poste client qui  peut être pointée du doigt. Un impayé conséquent, définitif ou pas, et l’entreprise suffoque  au point d’être dans l’incapacité d’honorer ses engagements. S’ajoutent à cela les marges  qui s’effritent de jour en jour du fait de la concurrence déloyale (le poids de l’informel) et/  ou de l’invasion des produits importés de pays auxquels nous sommes liés par des traités  de libre-échange (Turquie, UE, USA, pays du traité d’Agadir…). La sous-capitalisation de  la plupart de nos entreprises n’est pas en reste non plus. Pire encore, il n’est pas rare que  certains entrepreneurs ne jugent pas opportun d’injecter de l’argent frais dans les caisses de  leurs entreprises en difficultés de trésorerie, provoquant ainsi la méfiance des argentiers et  autres assureurs crédit.

Quelles solutions à envisager?
Youssef Douieb :
Sous d’autres cieux, les gouvernements ont, entre autres, compris le rôle  crucial et vital que jouent les assureurs crédit dans le financement indirect des entreprises et  en tous cas le risque de perturbation ou de tarissement de leur source d’approvisionnement.  Ils ont, en conséquence, mis en place des dispositifs à même d’encourager les assureurs  crédits à maintenir le niveau de garantie. Des dispositifs souvent baptisés «assurances-crédits  complémentaires», qui consistent à faire supporter à l’Etat une partie des créances impayées.

Certains pointent du doigt les banques qui auraient fermé le robinet des crédits destinés aux  entreprises de ce secteur. Dans quelle mesure cela est-il vrai ?
Youssef Douieb :
La banque est une entreprise comme une autre qui cherche à préserver ses  intérêts et, en tous cas, à se mettre à l’abri d’une crise systémique qui risque de l’emporte r.  Au Maroc, les banques ont très probablement profité de la situation qui a prévalu en Espagne,  où beaucoup de banques ont traversé d’énormes difficultés provoquées par le crise dans  l’immobilier spéculatif surtout.

Qu’est-ce qui vous rend si pessimistes concernant vos prévisions pour 2016?
Youssef Douieb :
Nous sommes plutôt circonspects. Une loi de finances bâtie sur un taux de  croissance inférieur à 3% n’appelle pas à l’enthousiasme. L’accroissement du niveau des  impayés dont souffrent les banques marocaines (+15% entre décembre 2014 et juin 2015)  non plus, puisque cela est susceptible de pousser les banques à davantage de parcimonie

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