Les entreprises mangent leur pain noir


En 2017, plus de 8.000 entreprises ont mis la clé sous le paillasson


L’économie nationale se débat dans une crise sans précédent. Les petites et les moyennes entreprises en sont les premières victimes. Des milliers d’entre elles ont déposé le bilan en 2017. L’année 2018 risque d’être pire.

Le chiffre est tristement astronomique: plus de 8.000 entreprises marocaines ont déclaré faillite en 2017. Une situation sombre et chaotique s’installe alors dans l’économie nationale. Pis encore: ce chiffre est en augmentation de 8,5% par rapport à 2016. En comparaison à 2009, pendant laquelle plus de 2.400 sociétés ont déclaré faillite, la hausse est, pour ainsi dire, vertigineuse. Outre la célèbre raffinerie Samir de Mohammedia dont on évoque désormais une fermeture définitive après l’échec de l’Etat à trouver des repreneurs et son entêtement injustifié à la sauver, l’écrasante majorité des entreprises affectées par la faillite sont à 90% des petites entreprises et 10% des moyennes entreprises.

Les secteurs les plus touchés sont, entre autres, le commerce, le BTP et l’immobilier. Des secteurs qui avaient connu une envolée pendant les années 2000 sous l’effet d’une conjoncture favorable, mais la forte spéculation qui régnait et règne toujours dans l’économie a tout fait basculer. La bulle immobilière soutenue par un gonflement boursier artificiel ne pouvait que conduire à des situations inévitables de faillites.

Un cocktail explosif
Une rapide évaluation concernant les conséquences sociales de ces fermetures permet de chiffrer à 40.000 le nombre de personnes tombées dans le chômage. Un véritable désastre social pour le pays. Ce cocktail explosif pointe sérieusement son nez et met la société aux prises avec une grave crise sociale. Si les chiffres peuvent paraître probablement élevés, pour certains, ils sont loin de refléter toute la réalité des entreprises au Maroc. Pour un patron d’entreprise ayant requis l’anonymat, «on estime facilement à 10.000 le nombre de sociétés susceptibles de déposer le bilan».

Mais, par crainte du fisc, ou probablement par volonté de continuer leurs activités dans l’informel, plusieurs entrepreneurs ne déclarent pas faillite. Et préfèrent ainsi se voiler le visage en attendant des jours meilleurs. Mauvaise gestion, contexte économique défavorable, forte pression fiscale, créances en souffrance, sous-capitalisation, les raisons derrière cette situation économique, pour le moins terrible, sont nombreuses. Mais, pour beaucoup, l’Etat est sérieusement pointé du doigt pour avoir mené des entreprises florissantes à la faillite.

Parce que l’Etat tarde à régler ses fournisseurs directs, ces derniers ne manquent pas de répercuter leurs déboires financiers sur les petites et les moyennes entreprises. On trouve, par exemple, de nombreux fabricants électriques contraints de baisser le rideau dans le sillage des problèmes financiers de leur clients directs, qui se trouvent être de grands établissements publics.

Pression fiscale
On trouve également plusieurs entreprises de BTP tombées dans l’incapacité financière de continuer leurs activités sous l’effet d’une crise forte du marché immobilier. Les arriérés de TVA constituent aussi un véritable problème pour les petites et moyennes entreprises. En somme, les créances liées aux commandes publiques se chiffrent à plus de 30 milliards de dirhams.

Un montant considérable qui prend en otage une bonne partie de l’économie marocaine. Concernant la pression fiscale, même si certains économistes tentent de la dédramatiser, elle demeure néanmoins l’une des principales raisons de la banqueroute de nombre de sociétés. Le taux de 31% pour l’impôt sur les sociétés (IS), actuellement appliqué, est considéré comme excessif par rapport à ce qui s’applique dans certains pays qui favorisent leurs entreprises. Ceci étant, nos entreprises vivent une crise sans précédent que même une bonne croissance économique, tant promise par le gouvernement, ne viendra pas endiguer.

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