Le choc des "Panama papers" ébranle la planète, le Kremlin en première ligne

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Le Kremlin s'est insurgé lundi contre l'enquête des "Panama papers", qui lève le voile sur un vaste système d'évasion fiscale et provoque une onde de choc mondiale en impliquant hauts responsables politiques, dont Vladimir Poutine, sportifs ou milliardaires.

Crise politique en Islande, lancement d'enquêtes en France et en Australie, indignation de la Russie, démentis en cascade: les répercussions de la divulgation par une centaine de journaux de quelque 11,5 millions de documents provenant du cabinet d'avocats panaméen Mossack Fonseca ont été immédiates.

Des noms de l'entourage des présidents russe Vladimir Poutine, chinois Xi Jinping, syrien Bachar al-Assad, mexicain Enrique Pena Nieto ou du roi marocain Mohammed VI, y apparaissent, ainsi que ceux de sportifs célèbres comme Michel Platini ou Lionel Messi.

A Moscou, la réplique a été particulièrement cinglante, visant directement les Etats-Unis: l'enquête a été menée notamment par des "anciens employés du Département d'Etat, de la CIA et de services secrets", et est pleine d'"inventions" et de "falsifications", a accusé un porte-parole.

La "cible principale" de l'enquête, selon laquelle des proches de Vladimir Poutine auraient détourné jusqu'à 2 milliards de dollars, serait la Russie et son président dans le but de "déstabiliser" le pays avant les prochaines élections, a-t-il assuré.

En Russie, comme en Chine, ces révélations étaient largement passées sous silence par les médias officiels contrôlés par l'Etat.

Enquêtes du fisc

Le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, qui aurait créé avec l'aide du cabinet une société dans les îles Vierges britanniques pour y cacher des millions de dollars, est aussi dans la tourmente: il a exclu de démissionner mais il devrait affronter dès lundi une manifestation hostile à Reykjavik avant un vote de défiance au Parlement.

Alors que recourir à des sociétés "offshore" n'est pas illégal en soi, plusieurs personnalités évoquées dans les "Panama papers" ont tenté de se dédouaner.

En Ukraine, sans nier l'existence de comptes aux îles Vierges Britanniques, le président Petro Porochenko a ainsi assuré respecter la loi à la lettre.

Egalement mise en cause pour des biens immobiliers à Londres gérés via le cabinet panaméen, la famille du Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif s'est défendue de tout acte illégal.

Plusieurs gouvernements ont déjà engagé des procédures.

En France, les révélations des "Panama papers" donneront lieu à des "enquêtes" fiscales et des "procédures judiciaires", a ainsi assuré le président François Hollande. L'Australie a lancé des investigations sur 800 clients du cabinet Mossack Fonseca.

La Suède a pour sa part demandé au Luxembourg des précisions sur une filiale de la première banque scandinave, Nordea, qui aurait facilité l'évasion fiscale de ses clients.

Le Panama retiré d'une liste grise

Plusieurs ONG de lutte contre la corruption ont appelé à l'interdiction pure et simple des sociétés écrans anonymes, à l'instar de Transparency International pour qui elles représentent "le côté obscur du système financier mondial".

L'organisation internationale Gafi (Groupe d'action financière) avait pourtant retiré en février le Panama de sa liste grise de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, après une série de réformes adoptée par son gouvernement.

Les détails continuaient à affluer lundi alors que les journaux promettent d’égrèner les révélations au fil de la semaine.

Sur la liste hétéroclite du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), au-delà des responsables politiques, figurent aussi des célébrités comme l'acteur chinois Jackie Chan ou le cinéaste espagnol Pedro Almodovar et des personnalités du sport comme le golfeur Nick Faldo ou un membre de la commission d'éthique de la Fifa.

Le directeur du quotidien Le Monde, Jérôme Fenoglio, s'est engagé à divulguer le nom d'un "grand parti politique français".

L'émission Cash Investigation diffusée mardi sur France 2 promet aussi de dévoiler des informations sur l'ancien ministre Jérôme Cahuzac, le député-maire Les Républicains de Levallois-Perret Patrick Balkany, l'homme d'affaires Patrick Drahi, mais aussi sur les pratiques de la banque Société Générale. Un millier de Français au total seraient concernés.

A travers le monde, plus de 214.000 entités offshore sont impliquées dans les opérations financières dans plus de 200 pays et territoires selon les révélations du consortium, qui couvrent une période de près de 40 ans allant de 1977 à 2015.

Pour le cabinet d'avocats Mossack Fonseca, leur publication est un "crime" et une "attaque" contre le Panama. Le gouvernement de ce pays a lui assuré qu'il "coopérera vigoureusement" avec la justice en cas d'ouverture d'une procédure judiciaire.

© AFP

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